Notes de la FRS

Perspectives d’évolution du budget et de la posture de défense post-crise sanitaire

Publication générique pour un programme/observatoire n°00/2020
Philippe Gros
Nicole Vilboux
28 août 2020 Version PDf

Résumé

L’évolution du budget et des axes stratégiques de la défense américaine dépend de multiples paramètres, à commencer bien entendu par la conjoncture économique mais aussi les résul-tats des élections de novembre et les niveaux de conflictualité internationaux, facteurs qui ont en commun d’atteindre un niveau d’incertitude inédit. Pour 2021, il apparaît probable que le budget soit celui anticipé compte tenu de l’état d’avancement de l’élaboration de la NDAA et des stimuli économiques financés en général. La grande question concerne l’année 2022 et les suivantes dans le cadre de la FYDP.

Sur ce plan, une majorité d’observateurs estiment probable que ce budget entame une décrue marquée. C’est en effet parfaitement plausible compte tenu des risques de reprise économique très lente et du niveau d’endettement fédéral consenti pour soutenir l’économie. La réduction serait alors du même ordre de grandeur que celle impulsée par le Budget control Act (BCA) il y a dix ans. Sachant que la readiness devrait rester la priorité des postes de financement, cet affaiblissement de l’effort budgétaire pourrait se traduire par une priorité encore plus marquée accordée à la modernisation au détriment, cette fois très net, du format des forces. Les alliés seraient d’autant plus sollicités pour accroître leur part du fardeau dans cette situation.

Cependant tout est affaire de perception de priorité. Il apparaît en effet tout aussi plausible que le budget soit maintenu à son niveau actuel si des préoccupations stratégiques accentuées (durcissement de la compétition avec la Chine, « wild card ») prennent le pas sur les considérations de déficit. Cette situation reste envisageable même dans le cas d’une reprise très lente si les Républicains restent au pouvoir. En d’autres termes, ces préoccupations conforteraient les « defense hawks » face au choeur de plus en plus audible des Démocrates et des « budget hawks ». La répartition de l’effort entre modernisation et format n’en serait pas pour autant facilitée en cas de regain d’activités opérationnelles prolongées, par exemple à l’occasion d’un « wild card ».

Inversement, on ne peut exclure des hypothèses beaucoup plus sombres, reposant sur une récession prolongée de l’économie américaine annulant toute marge de manoeuvre, voire sur le risque, bien réel selon nous, d’une crise politique interne majeure, par exemple un blocage institutionnel qui serait inédit depuis la guerre de Sécession, à l’occasion des élections de novembre. De telles hypothèses se traduiraient possiblement par une forte rétraction de l’effort de défense qu’il s’agisse de ses dotations financières, de ses ambitions stratégiques et capacitaires, et de sa posture de déploiement.