Camille Lons
18 avril 2019 Version PDf
INTRODUCTION
C’était il y a près de deux ans. La Première ministre anglaise Theresa May faisait une tournée des pays du Golfe très remarquée, quelques mois seulement après l’annonce du Brexit en juin 2016. Pour le Royaume-Uni, l’objectif est alors de renouer les liens avec ses partenaires historiques pour tenter de prévenir le coût économique du Brexit et prouver que le divorce avec ses partenaires européens ne se traduira pas par un retrait britannique de la scène internationale. Lors du Forum de Manama à Bahreïn en décembre 2016, le Secrétaire des Affaires étrangères de l’époque, Boris Johnson, avait ainsi an-noncé le retour du Royaume-Uni « à l’Est de Suez », près de 45 ans après son retrait de la région.
Cette alliance affichée avec les pays du Golfe, et notamment avec l’Arabie saoudite, fait cependant face à de nombreuses controverses. Malgré une offensive de charme lancée auprès des pays occidentaux, l’Arabie saoudite, premier client de l’industrie d’armement britannique, ne parvient pas à faire oublier son implication au Yémen, où elle est accusée par certaines ONG de crimes de guerre. De plus, le Royaume saoudien et son allié émirien ont adopté depuis quelques années des politiques très agressives et imprévi-sibles, que ce soit sur le plan extérieur avec l’embargo contre le Qatar, l’intervention au Yémen, et l’enlèvement à Riyad du Premier ministre libanais Saad Hariri, ou dans la ré-pression de plus en plus musclée de toute forme d’opposition en interne. À un moment où le Royaume-Uni cherche à approfondir sa coopération avec les pays du Golfe, la succession de scandales place Londres dans une position délicate, mais aussi questionne la fiabilité de ses alliés dans la région.
Le meurtre en octobre 2018 du journaliste saoudien Jamal Khashoggi a contraint le gou-vernement britannique à afficher une position de fermeté tranchant avec son habituelle réserve. L’embellie a cependant été de courte durée et l’unité affichée avec la France et l’Allemagne a vite volé en éclat, révélant les divisions intra-européennes et le déclin iné-luctable de l’influence britannique dans le Golfe, alors même que la région se tourne vers de nouvelles puissances telles que la Chine et la Russie.
Où en sont aujourd’hui les relations entre le Royaume-Uni et les pays du Golfe ? Que sont devenues les promesses de contrats et d’investissements faites il y a deux ans ? De quels leviers d’influence le Royaume-Uni dispose-t-il dans la région dans un contexte où les pays du Golfe se tournent de plus en plus vers de nouvelles puissances telles que la Russie et la Chine ?