Notes de la FRS

La contribution des armées aux interventions de secours d’urgence en catastrophes naturelles de grande ampleur

Publication générique pour un programme/observatoire n°00/2021
Philippe Gros
Alexandre Taithe
Aude Thomas
Vincent Tourret
30 avril 2021 Version PDf

Résumé

Selon les derniers travaux du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’évolution du Climat (GIEC), le réchauffement climatique qui affecte la planète pourrait atteindre les +2°C dès 2050. L’une des conséquences de ce changement accéléré est l’accroissement des risques d’évènements météorologiques extrêmes. Incendies et inondations dans les climats méditerranéens ou encore cyclones dans les espaces tropicaux devraient gagner en intensité et/ou en nombre. Ces risques qui viennent s’ajouter à ceux d’ordre séismique ou volcanique pèsent sur des systèmes sociétaux de plus en plus vulnérables, notamment à l’aune du vaste phénomène d’urbanisation qui les transforme. Les mégacités connaissent en général un développement anarchique exacerbant leur dépendance alimentaire, leur stress hydrique, leurs pollutions, la dégradation de leurs situations sanitaires ou encore leurs fragmentations politiques, des facteurs qui rendent ces villes particulièrement vulnérables à ces catastrophes naturelles autant qu’ils compliquent drastiquement la tâche des forces armées amenées à y opérer pour gérer ces crises.

Ces dynamiques vont considérablement accentuer les risques mais aussi l’ampleur des défis des interventions de secours d’urgence (ISU). Les armées françaises participent de longue date à ces engagements, tant sur le territoire national de la métropole ou des DROM-COM, sous l’autorité du ministère de l’Intérieur, qu’en intervention extérieure de secours d’urgence (IESU), dans le cadre préférentiellement de dispositifs onusien ou européen à l’intérieur des frontières de l’Union. Elles y contribuent sur requête, selon la règle des « 4i », c’est-à-dire lorsque les capacités de sécurité civile ou de sécurité générale sont jugées inexistantes, inadaptées, insuffisantes ou indisponibles. Des spécificités sont bien sûr à relever selon ces cadres d’engagement. Cela étant, ces contributions vont en général concerner des capacités de « masse » (aérotransport, transports terrestre et naval) de même que des moyens spécialisés à forte capacité (génie, soutiens santé ou énergie), mais elles peuvent aussi potentiellement relever d’appui ISR ou communications, ou encore de la mise à disposition d’emprises pour la sécurité civile voire l’accueil direct de sinistrés.

L’accroissement des enjeux incite à questionner le maintien de cette politique actuelle d’intervention des armées. Deux grandes options apparaissent envisageables. La première consiste à aménager cette politique, avant tout dans une amélioration des doctrines, de la préparation opérationnelle et de l’interopérabilité de coordination avec les organismes civils, mais aussi sur l’optimisation de l’aptitude des forces à opérer dans des environnements climatiques extrêmes. La seconde vise à largement étayer les contributions des armées en développant cette fois leur intégration opérationnelle avec les capacités de sécurité civile et générale, et en rehaussant le niveau d’importance accordé aux capacités « duales » dans le cadre des stratégies capacitaires des trois armées et du niveau interarmées. Une autre option, maximaliste, consisterait à confier aux armées une responsabilité directe dans ces ISU, qui deviendraient une de leurs missions principales, et à développer l’ensemble des capacités attenantes. En l’état peu crédible, elle est évoquée mais non détaillée dans cette note.