Exploring the Role Nuclear Weapons Could Play in Deterring Russian Threats to the Baltic States

Observatoire de la dissuasion n°70
décembre 2019

La RAND vient de publier un rapport étudiant le rôle que joueraient les armes nucléaires non-stratégiques dans un conflit OTAN-Russie autour des États baltes. Ce travail repose sur l’étude d’un large corpus théorique tiré de la Guerre froide, qui est rappelé dans la première partie. Il se nourrit également de l’expérience de plusieurs wargames menés par les experts de l’institut californien. L’étude part d’un certain nombre de postulats :

  • Tout d’abord, suite à une crise dans la zone balte, l’OTAN ne serait pas en mesure militairement d’empêcher une avancée des forces russes et leur invasion d’une des trois capitales, qui créerait une situation de fait accompli, et ce, malgré les mesures récentes visant à renforcer les capacités de défense sur la frontière Est.
  • Deuxièmement, ils estiment que si la Russie pourrait être tentée par une telle option de fait accompli, elle serait en revanche réticente à prendre des risques.
  • Troisièmement, ils notent la position défavorable de l’OTAN, aux niveaux géographique et stratégique. En effet, la Russie pourrait facilement trouver des cibles pour des frappes incapacitantes, sur le territoire des membres de l’OTAN, tout en ne ciblant pas les États-Unis. A l’inverse, si l’OTAN envisageait des frappes aux conséquences militaires similaires, elle frapperait directement la Russie, ce qui serait politiquement risqué car pouvant entraîner une escalade nucléaire rapide du conflit.
  • Enfin, ils doutent de la capacité actuelle de pénétration et de résistance à une première frappe des armes non-stratégiques de l’OTAN mais postulent qu’en conformité avec la NPR de 2018, de nouvelles options, notamment balistiques, seront prochainement disponibles.

Ceci étant posé, les auteurs s’interrogent sur le rôle des armes non-stratégiques et posent deux scénarios :

  • Une frappe non-stratégique de l’OTAN pour mettre un terme à une agression conventionnelle russe. Les réponses russes jugées les plus plausibles sont dans ce cas la poursuite de l’opération militaire voire une réponse similaire. L’OTAN ne parviendrait donc pas à retirer un avantage d’une telle frappe, d’autant que les cibles possibles seraient particulièrement peu attractives :
    • Des cibles militaires russes (exem­ple : batterie de défense antiaérienne) déployées sur les pays baltes, en raison des dommages causés sur le territoire d’un allié ;
    • Des infrastructures militaires russes déployées à Kaliningrad en raison de la forte présence de civils ;
    • Des infrastructures militaires russes situées en Russie continentale en raison du risque d’escalade.
  • Une frappe non-stratégique de l’OTAN en réponse à une première frappe russe limitée, par exemple sur des infrastructures portuaires ou militaires en Pologne. La situation serait relativement similaire : l’OTAN ne pourrait identifier de cibles possibles.

Dans ce contexte, les auteurs montrent que le principal problème de l’OTAN est avant tout la faiblesse de sa dissuasion conventionnelle, qui pourrait convaincre Moscou qu’il lui serait possible de mener une opération réussie dans la zone balte. En conséquence, les menaces de ripostes massives, ou de ripostes graduées, ne sont pas crédibles, car les scénarios qui mettent en œuvre l’emploi d’armes nucléaires non-stratégiques ne se concluent pas à l’avantage de l’Alliance. Pour eux, le recours aux nouvelles capacités requises par la NPR de 2018 est un élément positif mais ne change rien au problème fondamental de l’asymétrie existant entre l’OTAN et la Russie. Ils estiment que la crédibilité de la dissuasion nucléaire occidentale ne peut être restaurée que par une capacité démontrée à empêcher la réalisation d’une attaque de type « fait accompli » sur son territoire.

 

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Exploring the Role Nuclear Weapons Could Play in Deterring Russian Threats to the Baltic States

Paul K. Davis, J. Michael Gilmore, David R. Frelinger, Edward Geist, Christopher K. Gilmore, Jenny Oberholtzer, Danielle C. Tarraf, RAND Corporation, Santa Monica, 2019

Bulletin n°70, novembre 2019



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