Philippe Gros
Nicole Vilboux
20 septembre 2020 Version PDf
Introduction
La zone Asie-Pacifique, devenue Indo-Pacifique en 2017, est affichée comme une priorité de la politique de sécurité américaine depuis le début de la décennie 2010. La réaffirmation de l’importance économique et stratégique de cette région historiquement centrale pour le développement de la puissance des Etats-Unis, devait se traduire par un rééquilibrage (« rebalancing ») de l’attention diplomatique et militaire. Sa mise en oeuvre restait toutefois inachevée à la fin de la présidence Obama, en grande partie du fait de la difficulté à « sortir » des engagements au Moyen-Orient. L’objectif a été repris par l’Administration Trump et demeure l’un des rares axes stables de sa politique de sécurité. Même si cela ne s’est pas immédiatement traduit par l’application d’une stratégie claire pour répondre aux enjeux régionaux, l’évolution des relations avec la Chine amène aujourd’hui à un véritable recentrage des préoccupations, et plus spécialement des activités de défense, sur la région Indo-Pacifique.
L’objet du présent rapport est d’examiner ces développements dans le prolongement de l’étude effectuée fin 20171, pour apprécier les évolutions réalisées concernant l’organisation d’une stratégie globale et surtout l’adaptation continue du dispositif et des capacités militaires.
L’approche de l’Administration Trump sera aussi analysée au regard de celle de la France, qui accorde également une importance particulière à la zone. De même que les Etats-Unis s’affirment comme « puissance du Pacifique » depuis la fin du XIXe siècle, la France souligne en effet qu’elle est « une puissance souveraine de l’Indopacifique », possédant dans la zone « sept régions, départements et collectivités d’outre-mer (DROM-COM) abritant 1,6 millions de citoyens »2. A cet égard, il faut signaler que la conception française de la zone « Asie-Océanie » ou « Indopacifique », est bien plus large que celle de Washington : même si elle couvre aussi les deux océans, la stratégie des Etats-Unis n’inclut pas les enjeux du Moyen-Orient ou des côtes orientales de l’Afrique dans une vision qui reste centrée sur le Pacifique.