Sortir des élections ou des élections pour sortir des crises, Afrique centrale, afrique de l'est et région des grands lacs
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Ces journées d’étude sont organisées par
Les Afriques dans le Monde - Université de Pau et des Pays de l'Adour
Les élections, comme point d’entrée d’une analyse générale ou pays, font l’objet d’un débat récurrent depuis plus de 20 ans : à titre d’exemples, les termes avancés en 2004 (Voter en Afrique, Comparaisons et différenciations, de P. Quantin (dir), Logiques politiques, Paris), ou en 2011 par V. Darracq /V. Magnani ( « Les élections en Afrique : un mirage démocratique ? », Politique étrangère 2011/4), font écho dans les dernières analyses dont celle de M. Tarif / T. Vircoulon « Transitions politiques, les déboires du modèle de sortie de crise en Afrique », (IFRI, dec 2016) et dans les débats médiatiques (voir le Monde, RFI….).
L’année écoulée qui fut un pic électoral, abonde dans cette lecture critique pessimiste qu’entretiennent les inconnues des perspectives pour 2017 : les dysfonctionnements ont pris le pas sur les imperfections, les élections sont porteuses de violence, de crises (post et pré-électorale), d’instabilité et de mauvaise gouvernance, de manipulations et de cristallisation ethnique identitaire, tant et si bien que les fins de règnes politiques font le saut des renouvellements générationnels attendus ou les digèrent… et que les systèmes politiques que les démocratisations devaient dépasser sinon réformer, se reproduisent ou se renouvellent….
Les crises électorales signeraient l’échec, le dévoiement des transitions sous leurs différentes formes nationales, aussi bien pour les régimes que pour les systèmes politiques attendus et espérés (les décompressions autoritaires, les expériences consociatives, de compromis national, de peace building, y compris dans sa forme novatrice avec la ou les sociétés civiles)…. en fin de comptes, au-delà des manœuvres politiques des pouvoirs établis, elles témoigneraient du poids des contraintes structurelles et de la pesanteur des drames nationaux que pouvoirs et sociétés n’arriveraient pas à dépasser ou à purger.
Tant et si bien que les vieilles critiques réapparaissent sur le cout-risque de la voie démocratique (le mirage, le luxe….. de la démocratie en Afrique), que les explications recourent aux pesanteurs historiques dont les questions sur le leadership et les élites (y compris dans les nouvelles moutures des classes moyennes), sur la culture politique nourris des autoritarismes précoloniaux, coloniaux, néocoloniaux et postcoloniaux….
Ce sont autant de constats et d’analyses, justifiant le réalisme d’une reconnaissance, sinon d’une demande, voire la légitimité, d’une gouvernance autoritaire, mais assortie de performances développementalistes et sécuritaires. Les environnements géopolitiques internationaux (critique de l’occident et de l’universalisme, de la CPI, nouveaux et retour de partenaires), régionaux (organisations régionales en charge des crises post-électorales) et nationaux (une inflexion autoritaire, « démocrature », dictature soft qui ont renouvelé « modernisé » le contrôle des sociétés entre violence et marketing-communication), se prêtent à une acceptation de ce nouveau cours de l’ histoire immédiate, voire à une compréhension-défense des régimes en place.
Par ailleurs ces contextes électoraux et ces événements alimentent de nouvelles approches, des lectures critiques, moins systémiques et plus sectorielles sinon factuelles, mesurant le cout des élections, les procédures électorales et de leurs institutions, le rôle et le poids de la société civile, de institutions, des réformes constitutionnelles et des appareils judiciaires ; cet élargissement de l’analyse aux pratiques et appropriations montre l’importance des rituels électoraux voire d’une civilisation électorale ( voir dernier POLAF), mais aussi de nouvelles stratégies (usage de l’opinion et usage de la violence, partisanes) ; cette mise en perspective historique immédiate ciblerait les changements confrontées aux résonnances historiques. Le tout dévoile de fortes variations nationales, régionales, les singularités des champs politiques locaux.
Comme toujours, le tableau ainsi résumé manque de nuances. D’une part, une certaine Afrique semble échapper à ce renfermement ou à ces logiques (Afrique de l’ Ouest-sahélienne, Afrique australe, l’Afrique des pays émergents) mais, il est vrai, à la différence de l’Afrique médiane (Afrique centrale/RGL/Afrique de l’est), qui fera l’objet des journées d’études. D’autre part, des nouveaux acteurs, vecteurs et usages (la ou les sociétés civiles, la question religieuse et le chevauchement du religieux et du politique, les média, l’opinion publique, la mobilisation et la communication, les partis politiques..), de nouveaux comportements et stratégies, mais aussi de nouvelles représentations et mémoires (rôle des élites, expériences et mémoires politiques…) participent dans chaque champ politique national, au jeu politique d’une façon diverse et singulière, paradoxale (modération, radicalisation).
Enfin l’émergence économique et sociale, à la différence de la situation de rente (pétrolière..) ou de dépendance (financière) ou de chaos économique qui accordent aux pouvoirs établis des marges de manœuvre, offre, offrirait dans certains pays les opportunités d’une réelle transition et alternance (compromis politique, renforcement de l’état de droit, Constitution, ressources nouvelles modifiant les voies-règles des stratégies de la « politique du ventre » ou la tentation du « chaos »), mais aussi les moyens d’un « torno » d’une régulation et d’une stratégie de domination nouvelle de l’ opinion publique. Par ailleurs, y compris dans des situations difficiles et des plus radicales, comme ce fut déjà le cas dans les régimes de parti unique, la médiation électorale et la légitimité constitutionnelle apparaît nécessaire, incontournable, un rituel instrumentalisé, il en est de même des Constitutions et d’une opinion publique manipulées.
Au regard des deux années écoulées, l’Afrique Médiane pèse dans de telles dynamiques et le cours des événements à venir au Kenya et en RDC en raison de la position géopolitique de ces deux pays, pèsera bien plus encore.
Les journées aborderont cette approche-problématique en trois panels ou demi-journées (« les crises pré et post électorales, sortie de crise et sortir des élections », « enjeux politiques, géopolitiques et contraintes logistiques » « leadership et sociétés civiles ») confrontés à une lecture pays (Kenya et RDC), tout en faisant le point sur les actualités politiques et électorales (Congo, Gabon, Rwanda, Burundi, Tanzanie…) selon un plan diachronique (les crises en cours et les crises à venir).
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